Pratiques inspirantes : échange avec Jessica Brienne-Estevez

Publié 27/06/2021 par Marthe Pariset

Jessica est enseignante de maths-sciences au lycée professionnel hôtelier de Biarritz et enseignante formatrice T3*. Ses défis quotidiens sont tout à la fois de transmettre le savoir et d’intéresser des élèves dont les futurs métiers ne rendent pas immédiatement évident l’importance d’assister aux cours de maths !
Alors forcément, la crise sanitaire et l’instauration de l’enseignement en distanciel a représenté un challenge d’autant plus important. Avec le recul, Jessica a eu la gentillesse de partager avec nous ses bonnes pratiques en termes de dynamique de groupe, et ce qu’elle a retenu de ses différentes expérimentations. Des « secrets de fabrication » pédagogiques en quelque sorte mais surtout des idées à partager pour conserver le meilleur de cette expérience.

Q : Jessica, quel a été ton plus grand défi pendant ces périodes de distanciel ?

Indéniablement : garder le contact ! En lycée professionnel, il y a déjà des problèmes d’absentéisme, alors je vous laisse imaginer le nombre d’élèves que l’on peut perdre lorsqu’ils ne sont même plus obligés de venir au lycée !

Mon objectif a donc été de proposer une situation dans laquelle il y ait une vraie dynamique de groupe, de façon à pouvoir aborder des nouvelles notions et donner envie, par le biais d’exercices, de les mettre en application.

Q : Quelle a été ta principale problématique ?

Comme on n’a pas le visuel des élèves, il faut sans cesse les solliciter, et c’est encore plus compliqué en grand groupe. Si on les interroge 1 à 1, ça prend du temps et les élèves s’ennuient. J’ai donc dû trouver des astuces comme l’usage du chat, des sondages instantanés, etc, pour créer plus de dynamique et de spontanéité dans la sollicitation. Et évidemment choisir les plateformes adaptées au rythme !

Q : Comment se passe un cours-type en distanciel pour toi?

Je commence toujours par les automatismes de la classe : 5 à 10 minutes de mise en place (en classe, j’utilise Kahoot).

Puis, j’introduis une nouvelle notion avant de séparer la classe en groupes de 3 à 5 avec des rôles assignés : celui qui va écrire au tableau, celui qui va parler pour le groupe etc. ça aide vraiment à les responsabiliser.

Exemple d'animation de cours
Exemple d'animation de cours

L’activité est projetée, - je la soumets éventuellement aux élèves avant le cours pour ceux qui peuvent la lire avant - , avant de réaliser la mise en commun, et d’extraire les éléments à retenir.

Cela permet de faire des exercices en commun, en général j’en fait 1 avec eux, en les aidant via le chat, et sinon j’utilise les exerciseurs qui se trouvent dans Lycée Connecté. Ça aide vraiment d’avoir déjà cette base.

Les élèves utilisent également leur calculatrice graphique pour maintenir des modes de fonctionnement communs entre présentiel et distanciel. Enfin, je corrige les exercices avec le logiciel émulateur de la calculatrice TI-SmartView™ CE et projette les séquences de touches utilisées, ce qui est très pratique pour les retardataires !

Mais inutile de cacher que cela demande une vraie préparation !

Q : Avais-tu des appréhensions avant de mettre en place cela ? Quels outils utilises-tu ?

Oui, car il faut impérativement que la technique suive ! Quand ça ne fonctionne pas immédiatement, c’est là que l’on perd les élèves. Au début je passais beaucoup de temps à aider les élèves à se connecter etc… j’ai finalement réussi à lâcher prise -pas facile !- dans l’intérêt du groupe.

Pour les supports de visio, j’aime bien utiliser les ressources du CNED, notamment parce que j’apprécie la salle d’attente, qui évite les intrusions. Je regrette les problèmes de bande passante, notamment en partage d’écran.

J’utilise aussi les manuels intégrés à notre outil Lycée Connecté (onglet Média Livre) et permettent de suivre le travail des élèves et récupérer leurs copies. Lycée Connecté présente aussi l’avantage de conserver les documents chargés. L’affichage est lent mais cet avantage associé au fait de pouvoir faire des groupes facilement compense.

Q : Quels conseils donnerais-tu à des collègues qui n’osent pas se lancer ?

Il faut dépasser ses peurs, et se dire que c’est comme retrouver celles que nous avons tous connus à nos débuts en tant qu’enseignants.

Ensuite, il faut garder en tête la capacité d’attention des élèves, encore plus courte en distanciel qu’en classe physique. Animer une classe virtuelle, c’est élaborer des scénarii pédagogiques de 3 à 5 minutes qui se succèdent.

Enfin, il ne faut pas craindre de se planter en tant que prof. Elèves et profs sont confrontés au même challenge et coconstruisent la classe virtuelle. Certains y trouvent leur compte : les élèves influençables ou timides peuvent participer sans subir le regard des autres.

En bref, la patience et la bienveillance que l’on a avec ses élèves, il faut l’avoir pour soi.

 

*Jessica est également formatrice au sein du réseau T (pour revoir sa formation du 10 février : « Premier pas en programmation Python, exemples d'applications pour traiter le domaine algorithmique et la programmation des nouveaux programmes de mathématiques en lycée professionnel ».